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Depuis une dizaine d'années, la bioéconomie est présentée comme la voie permettant de rendre compatibles les objectifs de croissance économique avec les enjeux environnementaux et sanitaires par la généralisation d'une économie décarbonée (Dron 2013). L'appropriation de cet objectif par les acteurs scientifiques, économiques et institutionnels à différentes échelles, montre cependant que de nombreux débats se font jour sur la ou les trajectoires qui permettront de porter un tel changement de modèle dont les contours sont largement discutés (Barrère et Nieddu 2014, Debref, Nieddu et al. 2016,). Dans ce contexte de forte incertitude sur les composantes et logiques du changement, bioéconomie et transition écologique se présentent à la fois comme des références normatives et des espaces d'action déterminants des trajectoires de filières, de territoires et de ressources environnementales. Les économistes doivent donc se saisir de cette réalité complexe marquée par la diversité de compromis entre des logiques d'usage et de préservation de la nature, pour s'inscrire dans ces débats qui visent à penser les futurs possibles et souhaitables de nos économies et sociétés.

Nous entendons le faire en mobilisant et en articulant différentes approches économiques du patrimoine. La première est celle qui met l'accent sur l'existence de patrimoines productifs collectifs, sur lesquels s'appuient les acteurs pour explorer les trajectoires d'innovation dans le cadre de la bioéconomie (Nieddu et al., 2017) ou de filière territoriale (Cazals et al., 2014). La seconde est celle de l'approche patrimoniale dans le domaine de la gestion des ressources naturelles (Calvo-Mendieta et al., 2017) ou dans celui de la préservation des espaces fonciers (Cazals et al., 2018) qui met l'accent sur la nécessité de la constitution de collectif spécifique associant, dans leur relation à la ressource et dans la durée, être et avoir, logiques identitaires et logiques productives. Le croisement de ces différentes analyses patrimoniales de la bioéconomie incarnées dans des territoires aux histoires productives spécifiques devrait nous permettre de progresser dans la voie de la compréhension des mécanismes de régulation du changement.

Bibliographie

Barrère C., Nieddu M. (2014) "La pratique de l'approche patrimoniale", Economie Appliquée LXVII(N°4): 163-201.

Béfort N., Nieddu M. (2017) "De la variété des ancrages territoriaux des firmes en Chimie Doublement Verte", Géographie, économie, société 19(1): 133-152.

Calvo-Mendieta I., Petit O.,Vivien F.-D. (2017) « Common Patrimony : A Concept to Analyze Collective Natural Resource Management. The Case of Water Management in France », Ecological Economics, 137, 126-132.

Cazals C., Rivaud A. (2014) "Patrimoine sectoriel et performances: le cas de l'aquaculture", Économie et institutions, 20-21.

Cazals C., Dachary-Bernard J., Lyser S. (2018) « L'acquisition foncière du conservatoire du littoral au service de patrimoines communs »,  Revue Sud-Ouest Européen, n°45, 123-139.

Debref R., Nieddu M., Vivien F.-D. (2016). "Flux de matières et d'énergie: produire dans les limites de la biosphère", L'Économie politique (1): 24-35.

Dron D. (2013) "Les contours d'une bioéconomie soutenable", Annales des Mines - Réalités industrielles, fév., (1): 77.