Dans cette contribution, on souhaite étudier les dynamiques qui éclairent le regain d'intérêt dans la période contemporaine (2010-2018), pour la mesure de l'impact social des bibliothèques publiques françaises.
On attribue (partie 1) cet attrait, porté par les acteurs centraux (ministère de la culture) et par la profession des bibliothécaires (ABF) à une variété de facteurs, certains généraux (montée d'une défiance à l'égard des services publics ; progression d'un régime de performance managérial des services publics), d'autres plus spécifiques au contexte des bibliothèques publiques (notamment : montée de la numérisation des bibliothèques et accroissement de l'imaginaire de la dématérialisation ; décentralisation des politiques publiques de la lecture ; publication en Espagne d'une mesure d'impact « Fesabid », type SROI (FESABID, 2014), qui séduit les bibliothécaires) (Delcarmine et al. 2017). On montre (partie 2) que l'idée d' « impact social » (Gardin et al. 2017) revêt une multitude de signifiants pour les acteurs (la dynamique des bibliothèques, des effets sur la lecture, des effets sur socialisation, sur la démocratisation), et endosse divers rôles (plaidoyer soutenu par « la magie du chiffre » (Ogien, 2013)), visibilisation des bibliothèques, gestion, contrôle, aide à la décision) (Lascoumes, Le Galès, 2004). On propose une analyse critique (partie 3) d'une expérimentation de mesure d'impact qui a été réalisée dans les années (2016-2017) dans les bibliothèques du Val d'Oise (2017) et qui sert de référentiel dans les représentations des acteurs.